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Handicap : accessibilité au logement pour les personnes handicapées, un défi toujours d’actualité

Vingt ans après la loi du 11 février 2005 sur le handicap, l'accès au logement pour les personnes handicapées reste problématique en France. Découvrez les conséquences alarmantes de la loi ELAN, les chiffres des inégalités persistantes et les défis à relever pour une société plus inclusive.
Un femme sur un fauteuil roulant dans une cuisine

Vingt ans après la loi du 11 février 2005 sur le handicap, un constat alarmant

Malgré deux décennies après la Loi du 11 février 2005 pour l’Egalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, l’accès au logement pour les personnes en situation de handicap demeure un problème majeur en France.

La Fondation pour le Logement des défavorisés a récemment mis en lumière les difficultés persistantes rencontrées par ces personnes pour devenir propriétaires ou locataires. Si l’accessibilité des logements est un enjeu crucial, il reste pourtant peu abordé dans le débat public.

Les données statistiques sur le nombre d’habitations adaptées aux personnes en situation de handicap sont rares, voire inexistantes. Pourtant, depuis 2005, la réglementation impose une obligation d’accessibilité « universelle » aux logements neufs. Toutefois, la loi ELAN (Evolution du logement, de l’aménagement et du numérique) adoptée en 2018 a marqué un véritable recul en réduisant drastiquement cette obligation : le taux de logements neufs accessibles est passé de 80 % à seulement 20 %.

Une accessibilité réduite aux dépends des personnes handicapées

L’adaptation d’un logement au handicap peut impliquer divers aménagements :

  • L’élargissement des portes pour permettre le passage d’un fauteuil roulant,
  • L’installation de dispositifs sonores pour les personnes malvoyantes,
  • La mise en place de signaux lumineux pour les personnes malentendantes.

La loi ELAN, en limitant ces obligations, a suscité une vive indignation de la part des associations défendant les droits des personnes en situation de handicap. La réduction du taux de logements accessibles a été justifiée par un objectif gouvernemental de construction « plus et moins cher », au détriment de l’inclusion. Le texte prévoit qu’une part des logements puisse être « 100 % évolutive », c’est-à-dire qu’ils seraient partiellement accessibles et adaptables à moindre coût. Mais pour les associations, cette définition floue cache un laxisme réglementaire favorable au lobbying du secteur du bâtiment, réticent à investir dans des adaptations jugées trop onéreuses.

En réalité, l’impact de cette réforme est considérable. Selon certaines estimations, les 20 % de logements neufs rendus accessibles ne représenteraient qu’1 % du parc immobilier total concerné. Autrement dit, la proportion de logements supplémentaires adaptés aux besoins des personnes handicapées ne progresserait que de 0,2 % par an.

Un frein à l’application du droit au logement opposable

Cette limitation de l’accessibilité pose également un problème juridique majeur. La loi reconnaît le droit au logement opposable pour les personnes n’ayant pas accès à un logement décent et adapté à leur situation. Une commission de médiation est censée intervenir pour faire valoir ce droit, mais comment garantir son application si la législation elle-même réduit les obligations d’aménagement des bâtiments ?

En assouplissant les normes, le gouvernement expose les personnes en situation de handicap à une plus grande précarité, en contradiction avec les principes fondamentaux de la loi de 2005.

Des inégalités flagrantes dans l’accès à la propriété et à la location

Les chiffres témoignent d’une inégalité persistante :

  • Seuls 9 % des personnes en situation de handicap sont propriétaires, contre 23 % de la population générale.
  • En location, elles sont 19 % à avoir accès au parc privé contre 24 % pour la population globale.
  • Dans le parc social, elles représentent 24 % des locataires, mais ont 14 % de chances en moins d’obtenir un logement social par rapport aux autres ménages.
  • Enfin, 23 % des demandeurs en situation de handicap doivent attendre cinq ans ou plus pour obtenir un logement social.

Ces chiffres mettent en lumière une discrimination systémique qui complique l’accès au logement, d’autant plus que ces personnes font face à des difficultés d’insertion professionnelle et à des coûts supplémentaires liés à leur handicap.

Vers une politique plus inclusive ?

Malgré les avancées législatives de 2005, l’accès au logement pour les personnes handicapées reste un défi de taille en France. La loi ELAN a constitué un véritable recul, rendant plus difficile l’accessibilité aux logements neufs. Face à ces inégalités persistantes, une réforme ambitieuse et une volonté politique forte sont nécessaires pour garantir un accès effectif et digne au logement pour tous.

La question est désormais de savoir si les décideurs prendront la mesure de cette réalité et agiront pour faire de l’accessibilité une priorité, ou si les personnes en situation de handicap continueront à subir les conséquences d’une politique insuffisante.

Inès Chometon, juriste

Photo : unsplash

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